Historique de la pierre noire (hajar al-aswad / حجر الاسود) et sujets connexes
Hajar al-aswad / حجر الاسود est la pierre noire fichée dans l’angle sud-est de la Ka'ba. Elle mesure environ cinquante centimètres de diamètre, est de forme ovale et se trouve logée dans une châsse d’argent. Elle est installée dans l’angle sud-est de la Ka'ba, à un mètre et demi du sol. Au moment du pèlerinage, les pèlerins viennent la toucher et l’embrasser. La caresser et l’embrasser constituent des actes recommandés. La circumambulation (1) doit nécessairement commencer à sa hauteur, et c’est là qu’elle prend également fin. Cette pierre a une histoire étonnante ; il s’agit d’une pierre sacrée. Avant, comme après l’islam, elle a constamment été l’objet d’un soin et d’une complète attention. En réalité, elle compte parmi les éléments principaux de la Ka'ba. En raison de sa sacralité, l’Envoyé de Dieu (s) l’a conservée, alors qu’il a rejeté au loin les autres pierres sculptées représentant des idoles. Dans un hadith de l’Imâm al-Sâdeq (as), nous trouvons ceci : « Entre l’angle du Yémen (2) et celui de la pierre noire se trouvent ensevelis soixante-dix prophètes (as), tous morts de faim et de souffrance. »
D’où vient la pierre noire ?
Quant à savoir d’où vient la pierre noire, il existe de nombreux hadiths fondés sur le fait qu’elle serait descendue du paradis au moment de la chute sur terre de son Excellence Adam (as).
Lorsque son Excellence Adam (as) est chassé du paradis, il se retrouve sur la terre, hébété et perplexe, sans aucun être familier ni compagnon.
Quand soudain, son regard croise cette pierre particulièrement blanche et brillante ; il se sent proche de cette pierre. Dans la plupart des hadiths, la raison est ainsi exposée : lorsque son Excellence Adam (as) vivait au paradis, cette très belle pierre se trouvait auprès de lui, et lorsqu’il allait et venait, il la poussait du pied dans telle ou telle direction. C’est pourquoi, la voyant maintenant sur terre, il ressent de l’attachement et de l’intimité pour elle, il la prend dans ses bras, l’embrasse et l’emmène avec lui, la transportant de l’Inde, l’endroit où il a chuté du paradis, jusqu’à la terre de Makka (3) . Au cours de ce voyage, à chaque fois que, exténué, il la dépose par terre, Jibra’îl (4) (as) la porte à sa place. Comme son Excellence Adam (as) ne possède pas d’endroit où s’installer, Dieu le Très-Elevé dispose sur la terre de Makka, sur le lieu même de la Ka'ba, une tente issue des tentes du paradis, et son Excellence Adam (as) dépose la pierre noire dans l’un des angles de la tente.
Après son Excellence Adam (as), cette tente est transportée au ciel. A l’endroit qu’occupait cette tente, les fils d’Adam (as) élèvent une maison de pierre et de glaise, plaçant la pierre noire à l’endroit même où son Excellence Adam (as) l’avait placée auparavant. Il est rapporté de l’Imâm al-Bâqer (as) que trois pierres sont descendues du paradis : Hajar al-aswad / حجر الاسود / la pierre noire, la pierre de la station d’Ibrâhîm (as) (5) et la pierre des Banî Isrâ’îl (6) de laquelle ont surgit les sources. Lors de la destruction de la Ka'ba, événement qui intervient cinq ans avant la mission du Prophète (s), la pierre noire se trouvait en un lieu éloigné de la mosquée. Lorsqu’il a été question de l’installer à l’endroit où elle se trouve désormais, les Qurayshites se sont querellés. Cependant, le savoir-faire du Prophète (s) suscite la reconnaissance de cette vertu par tous les Qurayshites avant qu’elle ne soit installée de la main même de son Excellence (s). Sous l’effet du temps, ainsi que celui des changements et des transformations, la taille de la pierre a diminué, et elle s’est même trouvée divisée en plusieurs morceaux. La dernière fois qu’elle a été transformée, ses différentes parties ont été reliées et le tout a été logé dans une châsse protectrice en argent (7) . A l’heure actuelle, on l’a uniquement posée de manière à pouvoir l’embrasser et la caresser. Dans la plupart des hadiths, il est écrit que la pierre noire est une pierre du paradis qui est descendue sur terre en compagnie d’Adam (as) (Al-Kâfî, Vol. 4, p. 184). La pierre noire est venue sur terre en compagnie d’Adam (as) et s’est trouvée ensevelie lors du déluge de Nûh (8) (as). Ibrâhîm (9) (as) l’a ensuite déterrée et l’a installée dans la Ka'ba.
La pierre noire est un ange
Selon certains hadiths, la pierre noire est considérée pour être, à l’origine, un ange comptant parmi les anges les plus proches de Dieu. Lorsque Dieu reçoit le pacte des anges, celui-ci est le premier à avouer sa servitude envers Dieu. Pour cette raison, Dieu fait de lui un confident et le rend égal à Adam (as) au paradis. Au paradis, cet ange est auprès d’Adam (as), accomplissant la mention de Dieu pour lui et lui remémorant l’engagement que Dieu le Très-Elevé a reçu de lui. Pourtant, lorsque son Excellence Adam (as) est chassé du paradis et demeure un temps perplexe, Dieu le Très-Elevé place cet ange sur la terre, sous la forme d’une pierre blanche. Lorsque son Excellence Adam (as) voit cette pierre il ressent une certaine familiarité et de la tranquillité, bien qu’il ne la reconnaisse pas. Jusqu’à ce que Dieu le Très-Haut lui rende sa forme originelle, à savoir celle de l’ange. Là, l’ange demande à Adam (as) : « Qu’en est-il de l’engagement que Dieu le Très-Haut a reçu de toi ? » A ce moment, Adam (as) se sent mal, se met à pleurer, aussi, l’ange le prend dans ses bras. Ensuite, l’ange reprend une forme minérale et Adam (as) le transporte avec lui, pour finalement le placer dans un angle de la tente que Dieu le Très-Haut a fait descendre pour lui du paradis, et plus tard de la maison qu’Adam (as) construit avec l’aide des anges (10) . L’Imâm al-Sâdeq (as) dit : « Cette pierre (la pierre noire) est l’un des plus illustres des anges rapprochés du Seigneur, le premier à avoir dit ‘Oui’ lors des pactes accomplis dans le monde d’or (11) . Il est devenu le plus rapproché (des anges), et Dieu lui a confié les promesses des êtres humains. Aussi, au Jour de la résurrection, il reprendra sa forme angélique. C’est pour cela qu’on l’embrasse et qu’on le touche, afin de renouveler le pacte. »
La façon dont la pierre noire trouve sa place dans l’angle sud-est (de la Ka'ba)
Au sujet de la façon dont la pierre noire trouve sa place dans l’angle sud-est (de la Ka'ba), il faut rappeler que l’endroit où elle est fichée aujourd’hui est le celui-là même où Dieu le Très-Haut a pris d’Adam (as) l’engagement de la servitude, car cet ange se trouvait à l’endroit où se trouve aujourd’hui la pierre noire lorsqu’il a servi de témoin à ce pacte. Par ailleurs, il est le premier à avoir dit : « Labbayk / لبيك / Me voici ! ». Pour cette raison, après avoir été changé en pierre, le voilà placé à l’endroit même où il se trouvait avant, c'est-à-dire entre la porte et la station de Jibra’îl (as) (maqâm Jibra’îl / مقام جبريل). L’ange cité descendra sur son Excellence l’Argument (12) ('aj) à cet endroit et pactisera également avec lui. C’est là que se manifestera de nouveau l’Imâm du Temps ('aj) (13) . Au moment de l’apparition, son Excellence ('aj) s’appuiera sur l’angle sud-est, et tel un témoin de la fidélité à la promesse des fils d’Adam (as), il utilisera le lieu même où Adam (as) a fait sa promesse de servir Dieu le Très-Haut. Là, il argumentera ainsi : « A quelle hauteur êtes-vous restés fidèles au pacte divin qui a été pris de vous ? » Il existe de nombreux hadiths fondés sur le fait que la pierre noire était au départ une pierre blanche et très belle, et qui sous l’effet du péché des serviteurs, au contact des mains des pécheurs et à cause des actes des mécréants, qui accomplissaient en ce lieu des sacrifices à leurs dieux, est devenue noire. Cette pierre noire figure l’histoire muette des nombreuses générations de croyants qui sont venus là au cours des siècles. Elle est également celle qui vivifie le souvenir de la caresse des grands Amis de Dieu (as) et de leur prière, car lorsqu’ils venaient en ce saint lieu, auprès du Seuil divin, ils disaient : « O^ Seigneur, nous avons été fidèles au pacte, à la promesse que Tu as pris de nous et n’avons pas de dieu en dehors de Toi. »
back to 1 La circumambulation rituelle consiste à tourner sept fois autour de la Ka'ba dans le sens contraire à celui des aiguilles d’une montre, ce qui est rare dans les traditions ésotériques. (Les notes sont du traducteur et les traductions des passages du Coran de Denise Masson.)
back to 2 Chaque angle de la Ka'ba porte un nom. Celui de la pierre noire s’appelle ainsi parce qu’il héberge la pierre noire. L’angle du Yémen est tourné vers le Yémen (sud-ouest), l’angle nord-est est celui de la Syrie et l’angle nord-ouest celui de l’Irak.
back to 3 La Mecque.
back to 4 L’Archange Gabriel (as), le messager de Dieu, celui qui lit ce qui apparaît sur la « table gardée » et le transmet à l’Envoyé de Dieu (s) et aux prophètes (as).
back to 5 La station d’Ibrâhîm (as) est un lieu situé à quelques mètres de la Ka'ba, symbolisé par une colonne surmontée. Elle marque le lieu où Ibrâhîm (as) a laissé l’empreinte de ses pieds dans la pierre (aux quatre coins du monde musulman, on trouve des pierres portant la trace des pieds de l’Imâm ‘Alî (as), de l’Imâm al-Rezâ (as), etc).
back to 6 Les fils d’Israël. Isrâ’îl est le nom donné au prophète Ya?qûb (as), suite à son combat contre l’ange (selon la Genèse), et dont les fils ont engendré les douze tribus d’Isrâ’il.
back to 7 Il est possible d’en voir notamment plusieurs exemplaires au Palais de Topkapi, à Istanbul. La châsse a dû être changée plusieurs fois du fait de l’usure et les Ottomans les ont gardés, ainsi que d’autres reliques de tout premier ordre (une épée, un manteau, une dent et même, un poil de la barbe du Prophète (s) !).
back to 8 Noé (as).
back to 9 Abraham (as).
back to 10 Selon les hadiths.
back to 11 Il est dit que dans le monde de la préexistence, dans lequel les créatures sont sous une forme préexistante tels des « embryons de créature », Dieu réunit l’ensemble des créatures en devenir et leur pose cette question : « Ne suis-je pas votre Seigneur ? » La première future créature à répondre à cette question est la créature la plus élevée, ou la plus rapprochée, et ce « classement » est également évoqué par genre.
Ainsi, si la créature humaine la plus élevée est Mohammad (s), le Sceau des prophètes, parce qu’il a été le premier à répondre « Oui » à cette question, le premier des anges est cet ange-ci, le compagnon paradisiaque d’Adam (as) qui l’a suivi jusque sur terre sous la forme d’une pierre blanche. Ensuite, au fur et à mesure du délai pris pour répondre, nous avons affaire à des créatures de moins en moins pures, de moins en moins lumineuses… Il en ressortirait notamment la réalité de familles de créatures, totalement indépendantes de leurs liens biologiques, qui seraient proches pour avoir répondu « Oui » quasiment au même instant, ce qui donnerait lieu à une reconnaissance mutuelle dans ce monde ici-bas…
back to 12 Al-Hojjat ('aj) : l’Imâm du Temps, le Mahdî attendu…
back to 13 Pour ‘ajal Allâhû ta?âlâ faraja (Que Dieu hâte sa (noble) délivrance).
Caresser la pierre noire représente une forme de pacte
La pierre noire est située dans l’angle sud-est de la Ka'ba et, lors du pèlerinage, les pèlerins la touchent et l’embrassent. Cette pierre a toujours été honorée et estimée chez les musulmans. Depuis toujours, ils l’embrassent et recherchent sa bénédiction. L’Imâm al-Bâqer (as) dit : « La pierre noire représente la convention de Dieu, la caresser revient à pactiser avec Lui. » Dans une tradition rapportée d’Ibn ‘Abbâs, il est dit que dans le cas où un individu n’aurait pas pactisé avec l’Envoyé de Dieu (s), mais aurait par la suite touché la pierre noire, il aura alors conclu le pacte avec Dieu et avec l’Envoyé (s). De même, il est dit dans les hadiths que cette pierre était blanche au départ, mais les péchés perpétrés par les fils d’Adam (as) l’ont rendue noire (Al-Kâfî, Vol. 4, p. 190). On rapporte de l’Envoyé de Dieu (s) : « Le jour de la résurrection, Dieu donnera vie à la pierre noire. Ayant deux yeux pour voir et une langue pour s’exprimer, elle témoignera en nommant ceux qui l’ont touchée. » De même, on rapporte ceci de l’Envoyé de Dieu (s) : « La pierre noire est la main de Dieu sur la terre, celui qui la caresse, caresse la main de Dieu. » L’Imâm al-Sâdeq (as) a dit : « Si vous vous trouvez à proximité de la pierre et avez la possibilité de la caresser et de l’embrasser sans peine, embrassez-la, et en cas de cohue, faites le takbîr (1) sur elle. » (Al-Kâfî, Vol. 4, p. 404). De même, son Excellence (as) a dit : « Parmi les choses qui ont été empruntées aux femmes se trouve la caresse sur la pierre noire. » (Man lâ yahzuruhu al-faqih, Vol. 2, p. 326).
Un jour, alors qu’il embrassait la pierre, ‘Umar a dit : « Je t’embrasse uniquement parce que l’Envoyé de Dieu (s) t’embrassait, sinon, je sais que tu n’es rien d’autre qu’une pierre et que tu ne causes ni profit, ni dommage ! » Alî, l’Emir des croyants (as), a dit : « La pierre comporte à la fois un profit et un dommage, car cette pierre révèle la loyauté du croyant et le déni du mécréant. » De nos jours, lorsque les pèlerins accomplissent la circumambulation et parviennent à cette pierre, ils l’embrassent, passent la main sur elle et pactisent avec elle. Lorsque Dieu a fait venir les fils d’Adam (as), Il a pris d’eux un engagement. Ensuite, Il a fait appeler la pierre noire, qui était un ange, et lui a ordonné de conserver en elle l’engagement des fils d’Adam (as). Ainsi, le fait de caresser la pierre noire revient en réalité à pactiser avec Dieu.
Le Jour de la résurrection, la pierre noire témoignera pour ceux qui auront pactisé avec Dieu à travers elle. A chaque fois que le Prophète (s) accomplissait le pèlerinage, il caressait la pierre noire et renouvelait ainsi le pacte. Il est dit dans les hadiths : « Lorsque le cœur du monde se trouvera prêt pour l’apparition de l’Imâm du Temps ('aj), son Excellence se manifestera auprès de la Ka'ba. Il se rendra auprès de la pierre noire et s’appuiera sur elle. La pierre noire se changera en un oiseau blanc qui pactisera avec son Excellence ('aj). Ensuite, tous ceux qui ont de l’amour pour le Sauveur ('aj) pactiseront avec lui et la pierre noire sera le témoin de ces alliances. » Les pèlerins qui se rendent à Makka énoncent une invocation auprès de la pierre noire afin qu’au jour de l’apparition de l’Imâm du Temps ('aj), la pierre noire témoigne de leur engagement envers son Excellence ('aj). Chaque main espère embrasser la pierre noire. La pierre noire espère embrasser la main du Mahdî ('aj).
Les attentats contre la pierre noire
Selon la croyance des musulmans, cette pierre vient du paradis (hadith de l’Imâm al-Bâqer (as)). Ibrâhîm (as) et son fils Ismâ’îl (as) l’ont trouvée et l’ont intégrée à la construction de la Ka'ba. On rapporte de l’Imâm al-Sâdeq (as) que les Qurayshites, à l’époque de la Jâhiliya (2) , ont détruit la Ka'ba dans l’intention de la reconstruire. Ils sont passés tout près d’un affrontement et d’un massacre. (3) Pourtant, ils ont fini par trouver un accord : accepter le jugement du premier qui entrera dans la mosquée sacrée (4) . A ce moment-là, l’Envoyé de Dieu (as) a franchi la porte, et entendant ce qu’ils disaient, il a ordonné que l’on étende un vêtement sur lequel il a ensuite placé la pierre noire. Puis, il a ordonné qu’un membre de chaque tribu tienne un pan du vêtement pour le soulever. Lorsque la pierre noire s’est trouvée face à son logement, son Excellence (s) l’a saisie de sa main bénie et l’a déposée à sa place.
De même, il est écrit : « Au cours de la guerre opposant Hajâj et ‘Abdallâh ibn Zubayr, la Ka'ba a été démolie. Elle a ensuite été reconstruite pour pouvoir replacer la pierre noire. A chaque fois qu’un des savants, des juges ou des dévots voulut la replacer, la Ka'ba se mettait à trembler, et il était impossible d’y insérer la pierre. L’Imâm al-Sajjâd (as) est alors entré, leur a pris la pierre des mains, a invoqué le nom de Dieu et l’a installé dans son socle, sans être gêné par un seul tremblement. Alors les gens se sont exclamés : ‘Allâhu akbar !’ En 317 de l’Hégire lunaire, les Qarmates ont déferlé sur Makka et ont emporté la pierre noire chez eux, à Al-Ahsa, à Bahreïn. La pierre noire a demeuré là vingt-deux ans, jusqu’à ce qu’en 339, à l’époque du califat d’Al-Mutî? Allâh al-‘Abbâsî, elle soit transférée à Kûfa par l’intermédiaire d’Abû ‘Alî al-‘Alawî, alors qu’elle était brisée, pour être enfin remise à sa place. Quoi qu’il en soit, au cours des siècles, la Ka'ba ou « Maison de Dieu » a été maintes fois reconstruite, ou détruite, suite à une inondation ou à d’autres incidents. Cependant, la place de cette pierre paradisiaque n’a en aucun cas été changée. » (Mohammad Bâqer al-Majlesî, Bihâr al-Qnwâr, Vol. 96, hadith n° 13, p. 216. Chapitre sur la pierre noire).
back to 1 Dîtes : « Allâhû akbar / Dieu est plus grand ! » (Les notes sont du traducteur et les traductions des passages du Coran de Denise Masson.)
back to 2 Dans un cadre religieux musulman, on appelle Jahiliya (époque de l’ignorance) l’époque préislamique, particulièrement pour ce qui concerne la péninsule arabique.
back to 3 L’objet principal de la discorde concernait le choix de la tribu qui replacerait la pierre noire dans l’angle du nouvel édifice…
back to 4 Il s’agit ici d’une pratique courante parmi les Arabes de l’époque. Face à un différend insoluble, on décide de se fier à Dieu, et en se remettant au « hasard » (qui n’en est pas un précisément, selon cette conception). Ainsi, par exemple, ne parvenant pas à se mettre d’accord sur le prénom d’un nouveau-né, on décide de lui donner le nom du prochain à franchir le seuil de la tente, et c’est ainsi que certains ont par exemple pris le nom d’un chien !
L’installation de la pierre noire de la main du noble Prophète (s)
La pierre noire compte parmi les souvenirs éternels liés aux prophètes divins (as). Cette pierre, en plus d’être sacrée et digne d’estime pour tous les musulmans, faisait également l’objet du respect des Arabes de la période préislamique. Il existe des hadiths valides du noble Prophète (s) et des Imâms impeccables (as) à propos de la noblesse et de la prééminence de la pierre noire. La circumambulation, qui représente un des rites du pèlerinage, débute et s’achève face à la pierre noire (1) . Sur la base de traditions historiques, depuis le jour où son Excellence Ibrâhîm (as) a installé la pierre noire dans l’angle sud-est de la Ka'ba conformément au commandement de Dieu, des événements sont survenus suite auxquels la pierre en a été ôtée. L’un de ces événements s’est produit quelques années avant la mission de son Excellence Mohammad (s), lorsque les murs de la Ka'ba étaient endommagés par des inondations. Les tribus qurayshites avaient alors pris la décision de la réparer et de la reconstruire.
Les travaux furent partagés de sorte que tous puissent prendre part à la fierté de reconstruire une partie de la Ka'ba. Ce qui fut accompli avec succès. Vint le tour de la remise en place de la pierre noire. Une querelle violente éclata lorsqu’il fut question de savoir laquelle des tribus aurait l’honneur d’accomplir cette charge. Aucune tribu n’était prête à permettre qu’une autre tribu hérite de cette fierté. Le conflit parvint au point ou la tribu des Banî ‘Abd al-Dâr apportèrent une bassine pleine de sang et conclurent avec les Banî ‘Adî un accord selon lequel ils résisteraient jusqu’à la mort et ne permettraient pas qu’une personne n’appartenant pas à leur grande tribu puisse bénéficier de cet honneur.
Durant quatre ou cinq jours, les tribus s’attelèrent aux préparatifs pour la bataille. Abû Omîd, qui était alors le doyen des Qurayshites, proposa, pour éviter un massacre, que toutes les tribus se soumettent au jugement du premier qui entrera dans la mosquée. La providence voulut que ce premier soit Mohammad (s). C’est pourquoi tous furent satisfaits, parce qu’ils connaissaient le Prophète (s) pour sa probité absolue quant à la garde des dépôts, et pour la bonne santé de son âme. Après avoir impliqué son Excellence (s) dans la question qui avait provoqué leur désaccord, les chefs des tribus lui demandèrent d’énoncer son jugement. Le noble Prophète (s) leur demanda alors d’apporter une pièce de tissu. Il y déposa la pierre noire.
Puis, il demanda aux chefs des tribus de se saisir chacun d’un pan de ce tissu. Lorsqu’ils l’eurent saisi et soulevé, son Excellence (s) prit lui-même la pierre noire et la plaça dans son logement. Par cette sage mesure, le Prophète (s) parvint à prévenir une crise proche de provoquer une guerre terrible, ainsi que des rancunes.
Les leçons que l’on peut tirer de l’histoire de l’installation de la pierre noire
Le comportement des grands hommes et des faiseurs d’êtres humains est constamment porteur de messages et de leçons susceptibles d’aider les plus jeunes à trouver un sens à leur vie. C’est pourquoi, dans cette partie, nous allons nous consacrer aux leçons qui peuvent être tirées du sage jugement de son Excellence le noble Envoyé (s) concernant l’installation de la pierre noire.
1. Se charger de responsabilités
Se charger de responsabilités constitue une des nécessités de la vie en société. L’être humain a des responsabilités envers lui-même, envers ses coreligionnaires, envers ses semblables, et même envers la nature, et Dieu lui demandera des comptes à ce propos. Chacun, relativement à sa capacité intellectuelle et à l’amplitude de son être, ressent qu’il a des responsabilités vis-à-vis des autres. Aussi, le noble Prophète (s), eu égard à sa capacité étendue et à la hauteur de son esprit, ressent davantage ce sentiment de responsabilité envers les gens et la société. Voici ce que dit le noble Coran au sujet des questions auxquelles l’être humain devra répondre à propos de ses responsabilités : « L’homme pense-t-il qu’on le laissera libre ? » (Sourate Al-Qiyâmat (La Résurrection) ; 75 : 36). En vérité, s’il en était ainsi, qu’elle différence y aurait-il entre l’être humain et les animaux ? Et de quelle spécificité, de quelle distinction pourrait-il s’enorgueillir ?
Le ciel ne put assumer la charge du dépôt, et le sort tomba sur moi, le malheureux (2)
Lors d’un discours éloquent et pertinent adressé à Mâlik Ashtar, l’Imâm ‘Alî (as) dit à propos de l’acceptation des responsabilités de l’être humain envers ses coreligionnaires et ses semblables : « Les gens sont de deux sortes : soit ils sont tes frères en religion, soit ils sont comme toi dans leur constitution. » Dans la culture islamique, l’indifférence à la souffrance des autres et ne pas faire cas des autres ont été sévèrement blâmés.
Le noble Prophète (s), qui est le modèle des musulmans, les a sans cesse appelés à assumer leurs responsabilités et à les mettre en œuvre les uns pour les autres. A tel point que prêter attention aux musulmans est considéré comme la spécificité et le signe des musulmans, comme l’illustre très bien cette parole de son Excellence (s) : « Celui qui ne commence pas sa journée par se soucier de ce qui concerne les musulmans n’est pas un musulman. » Nous avons dans le récit de l’installation de la pierre noire un exemple du sens des responsabilités qu’avait son Excellence (s).
En effet, il accepte immédiatement la responsabilité de trancher un différend entre des tribus prêtes à se combattre. Son Excellence (s) aurait pu préférer s’abstenir vu la probabilité que les différentes parties n’acceptent pas son jugement ; or, son sens des responsabilités fit qu’il put résoudre un grave problème et prévenir des ennuis encore plus graves, comme une guerre ou un bain de sang.
2. Participation et coopération
Les êtres humains, dans le cadre de la vie en société, ont besoin de coopérer les uns avec les autres et de s’assister. Le progrès collectif et l’avancement de la société proviennent de l’aide que s’accordent et que reçoivent les êtres entre eux. Dans une société dénuée de ce principe, la pauvreté et l’arriération feront promptement leur apparition. Le noble Coran appelle les musulmans à coopérer et à s’assister mutuellement, il dit ceci : « Encouragez-vous mutuellement à la piété et à la crainte révérencielle de Dieu. Ne vous encouragez pas mutuellement au crime et à la haine.
Craignez Dieu ! Dieu est terrible en son châtiment. » (sourate Al-Mâ’ida (La table servie) ; 5 : fin du deuxième verset). Il est évident que la coopération et l’assistance auxquelles l’islam encourage concernent seulement les actes licites et permis, et non ceux qui sont illicites et interdits. De même, le fait de coopérer revêt des significations et des aspects aussi nombreux que variés. Nous trouvons par exemple :
l’encouragement au bien et l’interdiction du mal, le fait de consacrer des biens à Dieu pour le profit commun, de donner l’aumône, d’accomplir des choses qui sont positives pour tout le monde, etc. Dans la Sunna du noble Prophète (s), la coopération avec les siens fait l’objet de beaucoup d’attention. Son Excellence (s) encourageait les musulmans à s’entraider, tandis que lui-même œuvrait pour la propagation de cette culture.
L’épisode de l’installation de la pierre noire représente un des exemples de l’aide que son Excellence Mohammad (s) apportait aux autres.
3. Résoudre les difficultés et réconcilier les gens
La vie en ce bas monde, pour les raisons diverses que sont les différences des désirs et les divergences d’intérêts, est le lieu de la contention et du désaccord entre les êtres humains. Les divergences et les conflits qui trouvent leur origine dans les désirs de l’âme et les appétits innombrables de ce bas monde sont honnis par le noble Coran qui leur fait correspondre différents types de châtiments. Selon le Coran, se scinder en groupes, se séparer et diverger entraînent de nombreux tourments que certaines personnes goûtent à cause d’autres personnes. Quand des conditions conflictuelles et des inimitiés surviennent parmi les gens d’une époque, l’optimisme, la confiance en autrui, le sentiment d’accointance laissent la place au pessimisme, au soupçon et à la hantise. Le noble Prophète (s) a constamment encouragé les musulmans à amender leurs relations. Amender ses relations est propice à l’apaisement entre deux partis. Au regard de son Excellence (s), cet acte revêt tant d’importance qu’il est permis de recourir au mensonge afin de réconcilier deux opposants, bien que le mensonge compte parmi les plus grands péchés. Le noble Prophète (s) a dit : « Instaurez la réconciliation entre les gens, même par le mensonge. » De même, son Excellence (s) considère que le fait de réconcilier symbolise la meilleure des bienfaisances et des aumônes : « La meilleure des aumônes consiste à réconcilier deux personnes. »
4. Générer une influence positive
Avant l’apparition de l’islam, Makka était un lieu pollué et corrompu du point de vue moral et social. Cependant, cet endroit n’avait pas encore bénéficié de l’influence du noble Prophète (s). Son Excellence (s) était encore jeune, mais il disposait pourtant d’une raison, d’un jugement et d’une volonté solides. La réputation de son Excellence (s) ayant trait à ses excellentes dispositions a conduit les gens à avoir une totale confiance en lui et à venir le consulter à propos de leurs difficultés. Un exemple de la grandeur de la personnalité du noble Prophète (s) est illustré par le récit de l’installation de la pierre noire. Ce qui a entraîné les opposants à se fier à son Excellence (s) est dû au fait qu’il jouissait de la qualité de « gardien des dépôts » (3) . L’élégance et la qualité d’homme de confiance du Prophète (s) lui ont permis de jouer un rôle positif et déterminant pour réconcilier les tribus qui s’opposaient, ce qui a eu pour effet de modifier leur environnement.
5. Importance du leadership
La dimension de leader du noble Prophète (s), au sein de la famille comme au sein de la société, est riche de bien des enseignements. La qualité de leadership de son Excellence (s) est étonnante, que ce soit en temps de guerre comme en temps de paix, lorsqu’il fait face à des problèmes et à des situations sociales, ou lorsqu’il éduque les forces en présence par la piété. L’un des points importants de son leadership est sa manière de prendre des décisions en période de crise. Lors de l’incident de la pierre noire, les conditions étaient devenues anormales, les problèmes imprévus ont surgi subitement. Dans de telles conditions, les critères, les règles et les lois coutumières ne servent à rien. C’est pourquoi le problème ne peut être résolu que par la faculté de création du leader. Le noble Prophète (s), employant une méthode innovante associée au contrôle de la crise survenue, s’est efforcé d’en tirer le meilleur. Son comportement et son action sont ceux d’un leader, et son habileté est riche de beaucoup d’enseignements pour les tribus qui se trouvent là.
6. Jugement et sagesse
Le nom du noble Prophète (s) et sa conduite sont intimement liés à la notion de justice. Les caractéristiques du Prophète (s) influence les gens à le choisir comme juge lors de l’événement de la pierre noire. Le savoir, la sagacité, l’habileté, la bonne moralité et la clairvoyance de son Excellence (s) font que tous les opposants sont en définitive satisfaits de son action si bien qu’aucune des parties en présence n’a l’impression d’avoir été lésée. L’autre point important que doit respecter le bon juge, le juge juste, est le fait d’éviter de regarder du côté des riches et de pratiquer une discrimination. Lors de son jugement sans égal, son Excellence (s) n’expose aucun groupe ni aucun individu à la discrimination. En vérité, si le Prophète (s) avait, lors de cet événement, jugé en fonction d’une tribu particulière, que ce serait-il passé ? L’autre tribu aurait-elle été satisfaite ? Il est évident que les divergences se seraient renforcées et que le nœud se serait davantage resserré. C’est pourquoi ce n’est qu’à la lumière du sage jugement du noble Prophète que les divergences ont pu s’apaiser.
back to 1 Une ligne présente sur le sol de la mosquée sacrée, dans l’axe de l’angle sud-est dans lequel est fichée la pierre noire, délimite le début et la fin de la circumambulation. (Les notes sont du traducteur et les traductions des passages du Coran de Denise Masson.)
back to 2 Poème persan dont l’orateur est certainement Adam (as)…
back to 3 On pouvait lui confier un bien ou un secret avec la plus grande confiance. Des caravaniers par exemple lui confiaient leur fortune lorsqu’ils devaient s’absenter pour une longue période…
Références :
Ayatollah Nâser Makârem Shirâzî, Tafsîr Nemûneh, Vol. 3, p. 10 ; Shaykh Sadûq, ‘Ilal al-Sharayi', Vol. 2, chapitre 164 ; Sayyed Mustafa Dashtî, Ma?âref va Ma'ârîf (La connaissance et les célébrités), Vol. 4, pp. 405-407 ; Shahîdî, Târîkh tahlîlî-e eslâm (Histoire analytique de l’islam), p. 40 ; Magazine Entezâr-e nowjavân (L’attente du jeune homme), mois de farvardîn 1385, n° 10, article sur la pierre noire, de ‘Alî Mohammad Pûr ; Magazine Golbarg (Pétale de rose), mois d’ordibehesht 1387, n° 98, article sur les leçons à tirer de l’installation de la pierre noire, de Hamîd Rahmânî ; Magazine Golbarg (Pétale de rose), mois d’ordibehesht 1387, n° 98, L’évènement de l’installation de la pierre noire de la main du noble Prophète (s), de Hamîd Rahmânî.
source : alhassanain