quel moyen sera utilisé pour l’évaluation de nos actions ? comment le jugement se déroule-t-il dans la cour de la justice divine ? y a-t-il un dossier pour chaque personne ? quelle est la nature des documents que renferme chaque dossier ? comment l’accusé se défend il ? en vertu de quelle loi le jugement s’effectuera-t-il ? dans quelle mesure pourrait-on déterminer l’intercession des médiateurs et leur effet ?
en vérité tout ce que nous nous imaginons de l’au-delà est basé sur nos expérience nos vies ici-bas. cependant l’autre monde a ses propres caractéristiques, tout à fait indépendantes de celles du premier. tout ce que nous savons de l’au-delà nous est inspiré. toutefois la raison admet spontanément qu’il y a un jugement et une balance en vertu de laquelle les actions seront mesurées.
le noble coran dit à cet effet : « au jour de la résurrection, nous placerons des balances justes. aucune âme ne sera lésée, fût-ce du poids d’un grain de sénevé. nous l’apporterons. il suffira de nous, comme comptable ».
il dit également : « ce jour là, la pesée sera équitable. ceux dont les [bonnes actions] pèseront lourds seront les bienheureux. ceux dont les [bonnes actions] seront d’un poids léger, auront causé la perte de leur âme pour avoir injustement [dédaigné] nos versets ».
qu’est-ce que la balance ?
les critères et les balances au moyen desquels les objets sont mesurés sont variés. ainsi certains sont destinés à déterminer le poids ou le volume, d’autres à mesurer la longueur, d’autres encore à déterminer le nombre...etc. mais la question qui se pose à présent, c’est de savoir comment se présente la balance qui pèsera les actions des êtres humains le jour de la résurrection. est-elle semblable à la balance à deux plateaux fabriquée par l’homme pour peser les choses ?
c’est en effet, cette idée que se font certains. mais en vérité, toute chose possède sa propre balance. ainsi, lorsqu’on se retrouve dans l’impossibilité de déterminer le poids d’une chose (abstraite) à l’aide d’une balance qui n’est destinée qu’aux objets, on comprend que les actions ou les oeuvres possèdent leur propre système d’évaluation.
lorsque hichâm interrogea l’Imam sâdiq, que la paix soit sur lui, sur le verset coranique : « au jour de la résurrection, nous placerons des balances justes. aucune âme ne sera lésée ». ce dernier lui répondit : « les balances sont les prophètes et les conseillers ».
il est donc clair que la balance d’une œuvre est sa nature et non pas une balance déterminant les grammes ou tout autre système servant à mesurer les mètres... et c’est ce que nous constatons dans notre vie quotidienne, si nous prenons pour exemple et pour critère de la réalisation spirituelle, les hommes pieux.
dimensions de l’action humaine :
l’action humaine possède deux dimensions : la première représente l’essence et la forme. chaque action a une essence quel qu’en soit l’auteur, bon ou mauvais. ainsi l’injustice est en soi, répréhensible et la justice est en soi une œuvre pie.
le jour de la résurrection, ce sont les oeuvres pies qui seront exigées, mais elles ne suffisent pas à elles seules en sorte qu’elles doivent être accompagnées d’une autre dimension qui est la bonne intention de l’acteur.
de là, on pourrait diviser les actions de l’homme en quatre parties dont une seulement jouit de l’agrément divin. il s’agit en fait de l’action qui est essentiellement bonne et à laquelle l’auteur ajoute la bonne intention.
ainsi, la construction d’une école est une œuvre pie, mais il est primordial que son constructeur la construise avec une bonne intention pour qu’Allah, exalté soit-il, soit satisfait de lui. la fausse piété transgresse une condition essentielle parmi les conditions nécessaires à l’agrément de l’action le jour de la résurrection.
la sincérité, critère essentiel d’appréciation de l’action :
nombreux sont ceux qui pensent que la valeur du travail est liée à la quantité des bienfaits qui en découlent. ainsi plus l’action procure de bienfaits, plus sa valeur augmente.
dans l’ordre social, la notion d’oeuvre pie n’est souvent considérée en tant que telle que par rapport à la quantité des bienfaits qu’elle procure de façon générale. toutefois le but de l’acteur et ses intentions ne sont jamais pris en considération.
cependant, envisagée sous un rapport divin, l’œuvre pie, si elle apporte à son auteur un bienfait moral dans le processus de sa réalisation spirituelle, elle ne peut toutefois revêtir qu’une forme angélique et n’est complète que si elle est sincère.
ainsi, l’homme, en accomplissant de bonnes oeuvres, ne fait que se conformer sans condition aux injonctions d’Allah, et ses actions ne sont accomplis que pour Allah.
en effet, c’est en vertu de l’intention visant à gagner la satisfaction d’Allah, exalté soit-il, que l’action est agréée et que l’homme s’élève spirituellement et se rapproche d’Allah. il en résulte que ne n’est pas par rapport à la quantité que l’on évalue les actions, mais plutôt en fonction de la sincérité de l’intention.
exemple sur la valeur de la sincérité :
durant la conquête de tabuk, alors que les musulmans se préparaient à faire face à l’ennemi, le besoin de renforcer l’action se fit sentir. le prophète, qu’Allah prie sur lui et le salue, demanda alors à ceux qui le pouvaient, de faire don de biens, chacun selon ses moyens.
et c’est ainsi que abu ‘oqayl al-ansâri offrit, en signe d’aide, une petite quantité de dattes, qu’il a pu s’assurer au prix d’un dur labeur. les hypocrites firent de cette modeste contribution un sujet de plaisanterie, mais l’événement ne tarda pas à connaître une heureuse issue,
alors que le verset suivant qui faisait allusion à cette réaction fut révélé : « ceux qui médisent aussi bien des croyants qui s’acquittent de l’aumône légale [en offrant] plus que leur dû que de ceux d’entre eux qui trouvent tout juste pour s’en acquitter et les raillent, ceux-là, Allah les raillera et un châtiment douloureux leur est réservé ».
position de l’Islam à travers les versets et les récits :
le coran compare le travail dépourvu de foi et de bonne intention au mirage que l’assoiffé prend pour de l’eau : « quant aux mécréants, leurs actions sont comme un mirage dans une plaine : l’homme brûlant de soif le prend pour [une étendue] d’eau, mais quand il y arrive, il aperçoit que ce n’était rien. et non loin, il trouvera Allah qui lui réglera [d’une manière exacte] son compte. Allah est rapide dans ses comptes ».
il compare également le travail des incrédules à de la cendre sur laquelle souffle un vent violent par un jour de tempête : « les oeuvres de ceux qui nient leur seigneur sont comparables à de la cendre sur laquelle souffle avec violence le vent, un jour de tempête. ils ne pourront rien en retirer [le jour de la résurrection] et c’est là un égarement bien éloigné [de la vraie route] ».
notre maître Muhammad, qu’Allah prie sur lui et le salue, a dit en soulignant l’importance de la sincérité dans l’action : « toute chose possède une vérité, la sincérité, que le serviteur n’atteindra que s’il refuse d’être loué à la suite d’une action accomplie pour l’amour d’Allah ». il a également dit « en vérité, les actions sont liées aux intentions ».
l’Imam dja‘far ibn Muhammad sâdiq, que la paix soit sur lui, interprétant le noble verset ‘pour vous mettre à l’épreuve et [connaître] parmi vous le meilleur en œuvre’ a dit : « cela ne veut pas dire le plus grand nombre d’oeuvres, mais le plus juste parmi vous dans ses oeuvres, car la justesse traduit la peur à l’égard d’Allah et la bonne intention ».
il a dit ensuite : « la persévérance dans la sincérité de l’action est mieux que l’action elle-même. l’œuvre sincère est celle pour laquelle tu refuseras d’être loué si ce n’est par Allah, le tout-puissant. quant à l’intention, elle est plus méritoire que l’œuvre qui doit toujours en être accompagnée ». et il cita ce noble verset : ‘dis : chacun se comporte selon sa nature’, c’est-à-dire suivant son intention ».
a travers cet ensemble de versets coraniques et de récits, on comprend que l’agrément d’une œuvre pie est liée à la bonne intention et à la sincérité de son auteur.
ainsi, une action n’a point de valeur quelque soit sa grandeur, si elle est accomplie avec ostentation ou si son auteur est incrédule. par contre, une œuvre, si infime soit elle, conservera toute sa valeur si son auteur est sincère et bien intentionné.
Allah transcendant soit-il a dit à cet égard : « ceux qui se montrent charitables pour plaire à Allah et fortifier leur âme sont comparables à un jardin sur un coteau. lorsqu’il est arrosé par une pluie abondante, il donne deux fois plus de fruits. a défaut de pluie, il sera [humé] par la rosée. Allah observe ce que vous faites ».
la sincérité par excellence :
la sincérité par excellence réside dans l’obéissance à Allah qui n’est point motivée par la crainte du supplice ou l’espérance d’une récompense. ainsi, les hommes pieux adorent Allah parce qu’ils trouvent qu’il est seul digne d’adoration. ils consacrent leur amour exclusivement à Allah tout-puissant dont la satisfaction est leur objectif primordial. ils ne se préoccupent ni de l’enfer, ni du paradis.
l’Imam ‘ Ali, que la paix soit sur lui, a dit : « lorsqu’un peuple adore Allah en vue d’une récompense, c’est l’adoration des commerçants, lorsqu’un peuple adore Allah par crainte, c’est le culte des adorateurs et lorsqu’un peuple voue un culte à Allah en signe de reconnaissance, c’est l’adoration des libres ».
en vérité, la sincère adoration est celle qui ne vise rien d’autre qu’Allah ; c’est celle qui envisage la vie dans toutes ses dimensions et ses activités et où l’homme apprend à vivre, à mourir et à aimer.
l’Imam ‘ Ali, que la paix soit sur lui, a dit dans une recommandation faite à son fils al-Hassan : « la sincérité par excellence, c’est ton abstention de tout péché ».
la persévérance dans la sincérité : persévérer dans une action est plus difficile que l’action elle-même, tout comme la sincérité est une condition nécessaire pour que soit agréée l’action. car l’œuvre pie peut être menacée du danger d’effacement, d’où la disparition de ses bienfaits et par conséquent la privation de son auteur de la récompense divine.
l’Imam al-Baqir, que la paix soit sur lui, a dit : « la persévérance dans l’action est plus difficile que l’action elle même ». lorsqu’on lui demanda : « qu’est-ce que la persévérance dans l’action ? » il répondit : « lorsque l’homme fait don de quelque chose et effectue une dépense exclusivement pour Allah, son action est inscrite à son compte comme étant secrète, puis lorsqu’il en parle, elle est effacée et réinscrite en tant qu’action divulguée, et lorsqu’il en parle de nouveau, elle est effacée puis réinscrite en tant qu’action hypocrite ».
ainsi, l’œuvre pie peut être menacée par la fausse piété. toutefois si cette œuvre est rendue publique dans le but d’encourager les gens, elle ne s’inscrit plus dans le cadre de l’hypocrisie.
comment se présenteront les actions au lieu du rassemblement :
le joue de la résurrection, les oeuvres de l’homme se présenteront sous leur véritable forme, accompagnées de l’intention de leur auteur. ainsi, s’il est possible de dissimuler, en ce bas monde, les véritables intentions d’une action accomplie, il est en revanche impossible de le faire dans l’au-delà, où les oeuvres se manifesteront sous leur véritable nature et dans le même état d’esprit qui animait leur auteur lors de leur accomplissement, car les intentions accompagnent toujours leur acteur.
le noble coran dit à cet effet : « nous avons assigné à chaque homme son lot. le jour de la résurrection, nous exhiberons à son intention un écrit qu’il trouvera déroulé [et il lui sera ordonné] : lis ton écrit ! il te suffit d’être ton propre comptable, aujourd’hui ».
il dit dans un autre verset : « ce jour là l’homme sera avisé de ce qu’il aura fait au début et à la fin [de sa vie].
on interrogea un jour l’Imam sâdiq, que la paix soit sur lui, à propos du verset : « lis ton écrit ! il te suffit d’être ton propre comptable, aujourd’hui », ce à quoi il répondit : « l’homme dit tout ce qu’il a fait et tout ce qui a été inscrit à son compte comme si cela venait de se passer ». c’est pourquoi les incrédules diront : « malheur à nous ! qu’a ce registre à n’omettre de mentionner ni péché véniel, ni péché capital ».
comment les actions sont enregistrées :
les actions de l’homme, son comportement et les effets qui en découlent sont continuellement et rigoureusement enregistrées, ce qui est désigné dans le coran par actions passées et à venir. l’enregistrement ne comprend pas seulement les actions manifestes, mais également les pensées intérieures de l’homme. tout le comportement de l’homme sera porté au registre de façon détaillée.
le noble coran dit à cet effet : « nous donnons la vie aux morts. nous inscrivons ce que leurs mains ont avancé et les traces [laissées par leurs pieds].
lorsque les criminels se trouveront en face d’un registre complet et détaillé où sont portés tous les péchés commis de leurs propres mains ici bas, ils seront frappés de stupeur et auront un profond regret au point où ils diront : « malheur à nous ! qu’a ce registre à n’omettre de mentionner ni péché véniel, ni péché capital ? ils se trouveront en présence de leurs actes et ton seigneur ne lésera alors personne ».
lorsque les morts seront ressuscités pour être jugés, ils retrouveront toutes leurs actions dont ils auront oublié quelques unes : « le jour où Allah les ressuscitera en totalité, il leur fera connaître leurs oeuvres. Allah les aura dénombrées, mais eux les auront oubliées. Allah est témoin de tout ». en effet, tout sera enregistrée... tout acte et tout mouvement de la langue et bien plus, tout ce qui traverse l’esprit de l’homme.
en outre, il convient de souligner une autre conséquence qu’impliquent les actions de l’homme : certaines oeuvres pies s’effaceront en raison de mauvaises actions accomplies par l’homme, tout comme certaines actions répréhensibles se verront effacées ou purifiées grâce au repentir et aux bonnes oeuvres. c’est donc le solde des actions qui sera soumis au jugement le jour de la résurrection, et qui déterminera le sort de l’homme.
l’action accompagne l’homme :
en conclusion, toute action qu’accomplit l’homme ne se séparera jamais de lui ; elle l’accompagnera toujours.
qays ben ‘âçim raconte qu’il avait demandé au prophète, qu’Allah prie sur lui et le salue, de le conseiller. ce dernier lui dit alors : « la fierté est accompagnée de l’indignité, la vie de la mort, ce bas monde de l’au-delà. toute chose possède un juge et pour toute chose il y a un surveillant.
toute œuvre pie a son mérite et toute mauvaise action implique un châtiment. pour toute échéance est réservé un registre et sache qays, qu’un compagnon te suivra inévitablement dans la tombe et sera enterré vivant avec toi, tandis que toi, tu ne l’es plus. si ce compagnon est noble, il t’ennoblira, s’il est vil, il t’avilira.
il te tiendra toujours compagnie, tu ressusciteras avec lui et tu seras questionné à son sujet, fais donc en sorte que ce soit un bon compagnon, car s’il est bon il sera un réconfort pour toi et s’il est mauvais, il ne t’inspirera que frayeur, et ce sera ton acte ».
résumé :
1 - le jour de la résurrection, tous les rapports existant dans le monde disparaîtront, tandis que les choses se manifesteront sous leur véritable nature et seront mesurées par un système tout à fait différent de ce que l’on peut imaginer.
2 - les oeuvres de l’homme ont deux dimensions : la forme et l’intention.
3 - l’homme imagine la balance du jour de la résurrection à sa façon, mais en vérité ce seront les prophètes et les conseillers qui serviront ce jour là de critère.
4 - la valeur d’une action réside essentiellement dans la bonne intention et dans le degré de sincérité.
5 - la loyauté, la proximité d’Allah et sa satisfaction sont, selon certains versets coraniques et certains récits, autant de critères déterminant l’agrément de l’action.
6 - la sincérité par excellence réside dans l’obéissance à Allah qui n’est point motivée par la crainte du supplice ou l’espérance d’une récompense mais plutôt par le désir de satisfaire Allah le tout-puissant, seul digne d’adoration.
7 - la persévérance dans l’action est plus difficile que l’action elle-même.
8 - l’action, qu’elle soit accomplie publiquement ou secrètement, sera rigoureusement enregistrée et sera l’unique compagnon de l’homme.
questions et débats :
1 - la science empirique détient-elle quelque savoir sur la manière dont l’homme comparaîtra le jour de la résurrection, et sur son jugement ? pourquoi ?
2 - étudiez l’avis des mutazilites et des acharites à propos des critères d’évaluation des oeuvres, le jour de la résurrection ?
3 - comment les oeuvres seront-elles mesurées et par quel critère d’évaluation ? pourquoi ?
4- qu’entend t-on par œuvre pie et bienfaiteur ? citez un exemple.
5 - qu’elle est la condition qui doit être remplie pour qu’une œuvre soit agréée ?
6 - citez un seul verset et un seul récit portant sur la valeur de l’action ?
7 - qu’est-ce que la sincérité par excellence dans l’action ?
8 - comment les oeuvres de l’homme sont-elles enregistrées et comment se présenteront-elles le jour de la résurrection ?
source : sibtayn