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La Dernière Maladie du Prophète

La Dernière Maladie du Prophète

La Dernière Maladie du Prophète
La fièvre du Prophète revint à la charge dans la maison de Maymûnah, en s'aggravant et avec des accès occasionnels d'évanouissement.

Toutes ses femmes et tous ses parents se rassemblèrent pour le voir. On lui conseilla de ne plus se déranger pour rendre visite à tour de rôle à toutes ses femmes, comme il le désirait, et de rester tranquille dans un même endroit pendant sa maladie. La maison de aiicha fut proposée et admise à ce propos, d'une façon unanime. Le Prophète, la tête bandée et les vêtements mis hâtivement autour de son corps, fut conduit à la demeure de aiicha, soutenu par al-Fadhl, le fils d'al-`Abbâs d'un côté, par `Ali son cousin et fils adoptif de l'autre. Selon le récit fait par aiicha, celle-ci affirme que le Prophète était soutenu d'un c6té par al-Fadhl, de l'autre par une autre personne. Elle répugnait à citer le nom de `Ali, en raison du sentiment d'inimitié qu'elle éprouvait pour lui.

aiicha Espionne les Mouvements du Prophète
Une nuit, alors qu'il se trouvait dans la maison de`aicha, le Prophète se leva doucement de son lit et sortit dehors. `aicha pensa qu'il allait chez une autre femme et le suivit à pas de loup jusqu'à ce qu'il arrivât au cimetière de Baqî` où il pria pour le pardon de ceux qui y reposaient. Avant qu'il ne retournât, elle se hâta vers sa maison, où tout de suite après le Prophète arriva. IL devina ce qu'elle avait fait et l'interrogea. aiicha n'avait d'autre solution que d'avouer. IL lui dit :

"Tu m'as soupçonné d'être allé chez une autre femme alors que je me suis rendu au cimetière par obéissance au Commandement d'Allah". Selon un autre récit, le Prophète fut suivi par Borayah, la bonne, envoyée par `aicha pour surveiller le Prophète. Selon une troisième version de ce fait, c'est Abû Râfi`, le serviteur du Prophète qui l'accompagna. Un quatrième récit affirme que c'est Abû Muwayhebah qui alla avec lui.

Hâter l'Expédition vers la Syrie
Bien que la maladie du Prophète s'aggravât de jour en jour, elle ne le confina toutefois pas totalement à la maison. Il maintint l'habitude d'aller chaque jour au Masdjid par la porte de son appartement donnant sur la cour, pour diriger la prière. Une semaine après avoir appelé ses hommes à préparer l'expédition vers la Syrie, il s'aperçut qu'ils ne s'empressaient pas d'aller au camp de rassemblement à Jorf. Il était en colère d'entendre les gens dire : "Il choisit un adolescent pour commander le chef des Muhâjirin".

Un jour, après la prière, il s'assit sur la chaire, la tête toujours bandée avec une serviette, et s'adressa ainsi à l'assistance :

"ô vous les hommes ! Qu'est-ce que cela veut dire ? On dit que certains d'entre vous grognent contre le fait que j'aie nommé Osâmah pour le commandement de l'expédition vers la Syrie. Si vous me reprochez maintenant cette nomination, désormais vous me blâmerez aussi pour la nomination de son père, Zayd. Je voudrais que vous le traitiez bien, car il est l'un des meilleurs d'entre vous. Maudit soit celui qui s'abstient de rejoindre l'armée". IL demanda ensuite que l'expédition fasse mouvement le plus tôt possible, et quittant la chaire, il rentra chez lui.

Avertissement aux Muhâjirîn et aux Ançâr
Un autre jour, toujours après la prière, il dit à l'assemblée : "Le Seigneur a donné d Son serviteur le choix de continuer dans cette vie, alors qu'elle est pour lui ténèbres. Quant à moi, j'ai choisi l'autre vie. Tous les autres Prophètes moururent avant moi. Vous ne devriez pas vous attendre à ce que je vive éternellement".

Après un moment de silence, il poursuivit : "Vous 1es Ançâr ! Traitez bien ceux à qui vous avez donné refuge. Et vous les Muhdjirîn ! Les Ançàr me sont sûrement chers, car c'est parmi eux que j'ai trouvé refuge. Honorez-les donc et traitez-les bien". Puis, il récita la Sourate al-`Açr : "Par le temps ! Oui, l'homme est en perdition, sauf ceux qui croient; ceux qui accomplissent des œuvres bonnes; ceux qui se recommandent mutuellement 1a Vérité, ceux qui se recommandent mutuellement la patience", et le verset 24 de la Sourate Mohammad : "Que peut-on attendre de vous, si vous déteniez l'autorité, sinon semer la corruption sur la terre et rompre vos liens de parenté". IL mit ainsi en garde ses Compagnons contre leurs desseins malicieux.

De l'Or Destiné à l'Aumône
Un jour, le Prophète interrogea `aicha sur l'or qu'il lui avait confié pour qu'elle le gardât. IL s'agissait de sept dinars, le reliquat d'une somme qu'il avait reçue pour la distribuer comme aum6ne. `aicha ayant répondu qu'elle l'avait chez elle, il lui demanda de le distribuer parmi les pauvres. Puis il tomba dans un état de semi inconscience. Peu après, lorsqu'il reprit connaissance, il demanda encore à `aicha d'offrir l'or en charité. IL réitéra sa demande une troisième fois mais vainement. A la fin il lui reprit l'argent et le confia à `Ali qui le distribua tout de suite aux familles pauvres.

Le Prophète Empêché de Transcrire sa Volonté
Le Jeudi précédant sa mort, et alors que beaucoup de ses principaux Compagnons étaient présents dans la chambre, le Prophète, étendu sur son lit, demanda qu'on lui apportât ce qu'il fallait pour écrire quelque chose : "Apportez-moi du papier et de l'encre afin que je puisse consigner pour vous un document qui vous évitera de retomber dans 1'erreur". `Omar s'interposa immédiatement ainsi : "L'homme est en délire. Le Livre de Dieu (Une grande partie des Musulmans considère cette phrase de Omar comme un geste de séparation de l'orthodoxie établie par le Prophète qui avait ordonné à tout le monde à suivre le Coran et sa Famille, en déclarant : "Je vous laisse deux grands Préceptes dont chacun dépasse l'autre en grandeur : le Livre de Dieu et ma Famille. Ils ne se sépareront pas jusqu'à ce qu'ils me rencontrent au Paradis") nous suffit". Quelques-uns parmi l'assistance dirent qu'il fallait apporter le nécessaire pour écrire; d'autres se rangèrent du côté de `Omar. La discussion s'anima et des voix s'élevèrent très haut pour contrarier le Prophète.

Les dames derrière les rideaux voulurent fournir le matériel de l'écriture mais `Omar les rabroua : "Silence ! dit-il. Vous êtes comme les femmes de l'histoire de Joseph. Lorsque votre maître tombe malade, vous fondez en larmes et dès qu'il va un peu mieux, vous vous mettez à faire des taquineries". Ayant entendu ces propos, le Prophète dit : "Ne les grondez pas : Elles valent sûrement beaucoup mieux que vous cependant". Maintenant quelques personnes se mirent à demander au Prophète ce qu'il désirait enregistrer. Mais le Prophète récita sur un ton de colère le verset 2 de la sourate al-Hujurât (IL est dit que ce verset fut descendu à la suite d'une dispute entre Abû Bala et Omar concernant la nomination du gouverneur d'une ville, au cours de laquelle ils élevèrent la voix si haut en présence du Prophète qu'on pensa qu'il convenait d'interdire de telles indécences dans l'avenir (Sale). Le non-respect de ce Commandement conduit le Prophète à rappeler l'avertissement à cette occasion) (" ô vous les croyants ! N'élevez pas la voix au-dessus de celle du Prophète. Ne lui adressez pas la parole d voix haute, comme vous le faites entre vous, de crainte que vos œuvres ne soient vaines, sans que vous vous en doutiez"). Et dit : "Allez-vous en ! Laissez-moi seul ! Car ma condition présente est meilleure que celle à laquelle vous m'appelez". Après avoir marqué une pause, il poursuivit : "Mais faites attention aux trois injonctions suivantes : un, chassez tout Infidèle de la Péninsule; deux, recevez avec hospitalité les délégations et offrez-leur le repas avec largesse, de la même façon que je le faisais". Quant à la troisième injonction, on dit qu'elle a été oubliée par le narrateur ou que sa mention a été omise.

Ibn `Abbâs se lamenta sur l'irréparable perte subie par les Musulmans ce Jeudi, par suite de l'empêchement du Prophète d'écrire ce qu'il voulait pour la guidance de ses adeptes. Se rappelant cet événement, il pleura jusqu'à ce que ses joues et sa barbe fussent mouillées par ses lamies.

La maladie du Prophète s'aggravait chaque jour un peu plus et il en était très conscient. L'expédition de Syrie le préoccupait cependant sérieusement. Il continua à dire à ceux qui l'entouraient : "Envoyez rapidement 1'armée d'Osâmah".

Abû Bakr Conduit la Prière
C'est un fait admis que jusqu'au soir du Jeudi précédant son décès, le Prophète continua à aller au Masjid pour diriger les prières à toutes les occasions. Mais la nuit de ce Jeudi-là, on dit qu'il ne put présider à la congrégation.

IL y a beaucoup de hadiths qui affirment que c'est Abû Bakr qui conduisit la prière de nuit ce jour-là. On dit qu'à dix-sept reprises, le Prophète recommençant à faire la prière de la nuit du Jeudi précédant sa mort, et ne pouvant pas présider à la congrégation au Masdjid, commanda à Abû Bakr de diriger la prière. IL est admis également que le matin du jour de sa mort, le Prophète alla au Masdjid, s'assit à côté d'Abû Bakr qui présida à l'assemblée et que lorsque les prières prirent fin, le Prophète fit un sermon du haut de la chaire avec une voix si puissante que sa portée dépassa de très loin les portes extérieures du Masdjid

Voici une tradition concernant ce fait: "A l'heure de la prière de nuit du Jeudi, le Prophète donna l'ordre de demander à Abû Bakr de diriger les prières. `aicha dit alors : "ô Prophète ! Abû Bakr a le cœur fragile. Ordonne plutôt que `Omar dirige les prières". Le Prophète consentit à cette demande, mais `Omar en recevant l'ordre du prophète objecta qu'il ne pouvait pas remplacer Abû Bakr tant qu'il était présent. Finalement ce fut Abti Bakr qui dirigea les prières. Dans l'intervalle, le Prophète se sentant suffisamment rétabli, vint au Masdjid Abû Bakr ayant vu le Prophète arriver, s'apprêta à regagner sa place dans l'assemblée, pour laisser le lieu libre pour le Prophète. Mais ce dernier le retint par ses vêtements et lui ordonna de rester là où il était et il prit place à côté de lui, et se mit à réciter alors qu'Abû Bakr dirigeait la prière".

Ibn Khaldûn dit qu'à dix-sept reprises le Prophète dirigea de la même manière les prières d'Abû Bakr en étant assis à côté de lui alors que la congrégation était dirigée par ce dernier.

Selon une autre tradition, le Prophète avait ordonné à

`Abdullah Ibn Zam`ah de demander aux membres de la congrégation de lire eux-mêmes les récitations des prières. Alors que `Abdullah se dirigeait vers le Masdjid, `Omar fut le premier à le rencontrer. Aussi lui demanda-t-il de diriger les prières. `Omar se mit alors debout et de sa voix puissante il commença à réciter la formule préparatoire à la prière, "Allâhu Akbar". Le Prophète entendant la voix de `Omar depuis son appartement s'écria : "Non ! Non ! Ne laissez personne d'autre qu'Abû Bakr diriger les prières". `Omar se retira et désapprouva la conduite de Zam`ah. Celui-ci reconnut alors que le Prophète ne lui avait nommé aucune personne en particulier pour conduire les prières.

Une troisième tradition affirme : "Lorsque l'heure de la prière en assemblée fut arrivée, le Prophète demanda de l'eau pour faire ses ablutions. Mais essayant de se lever, ses forces le trahirent au point qu'il commanda qu'Abû Bakr récite les prières dans la congrégation. Et ayant donné cet ordre, il s'évanouit. Dès qu'il reprit connaissance, il demanda si Abû Bakr avait bien reçu son ordre. `aicha répondit qu'Abû Bakr avait le cœur tendre, qu'il pleurerait et que les gens entendraient difficilement sa voix; bref, qu'Omar conviendrait mieux, s'il recevait l'ordre de diriger les prières. Mais le Prophète réitéra l'ordre qu'Abû Bakr récite les prières à la congrégation. `aicha recommanda encore `Omar pour cette tâche, mais le Prophète voulait que personne d'autre qu'Abû Bakr ne fasse les récitations. Ensuite, sur l'insistance de aicha, on exhorta le Prophète à autoriser `Omar à présider à la congrégation. Contrarié et irrité, le Prophète s'exclama : "Vraiment vous êtes pareils aux femmes stupides de l'histoire de Joseph !

Faites exécuter tout de suite l'ordre que j'ai donné". L'ordre fut donné et Abû Bakr se mit à réciter le Takbîr. Dans l'intervalle, le Prophète ayant récupéré ses forces, était venu au Masdjid, soutenu par `Ali et `Abbâs. Lorsque Abû Bakr entendit le bruissement des vêtements du Prophète, il s'apprêta à revenir en arrière pour se ranger parmi la congrégation, mais le Prophète lui ordonna de rester à sa place et il s'assit à côté de lui. Ainsi, dans la prière, Abû Bakr fut dirigé par le Prophète et la congrégation par Abû Bakr.

Selon une tradition, Hafçah avait donné l'ordre à Bilâl de faire en sorte que son père (`Omar) dirigeât les prières publiques. A la suite de quoi, Mohammad la réprimanda et dit : "Elle est comme les femmes de l'histoire de Joseph". Et d'ajouter : "Dis à Abû Bakr de diriger les prières, car vraiment, si je n'en fais pas mon député, les gens ne lui obéiront pas (K. Wâqidî, p.145, cité par Muir, Vol. IV, p. 266).

"On dit qu'Abû Bakr dirigea les prières pendant trois jours avant le décès du Prophète. Selon une autre tradition, il dirigea les prières à dix-sept occasions, ce qui équivaudrait à trois jours et une partie du quatrième" (K. Wâqidî, p.145, cité par W. Muir, Vol. IV, p. 264).

Il ressort des différentes traditions précitées que le Prophète sortit jusqu'au dernier jour de sa vie au Masdjid et dirigea lui-même les prières. IL est raisonnable aussi de penser, que le Prophète ayant déjà donné l'ordre à Abû Bakr de partir avec l'armée de Osâmah et invoqué la malédiction contre qui conque négligerait d'exécuter l'ordre de rejoindre l'armée n'eût pas pu en même temps lui donner l'ordre de présider aux Prières Publiques à Médine - ce qui aurait supposé qu'Abû Bakr se fût trouvé à Médine, contrairement à son ordre précédent qu'il ne retira pas jusqu'à sa mort.

On dit que le droit de présider à une prière publique était toujours reconnu comme le signe manifeste du chef du pouvoir séculier. Si Abû Bakr avait été vraiment désigné pour présider aux Prières Publiques, les Ançâr qu'on prétend s'être rassemblés à Saqîfah pour choisir un Calife alors que le corps du Prophète n'avait encore été ni lavé ni enseveli, n'auraient pas osé entreprendre si hâtivement cette initiative en infraction avec un si récent ordre du Prophète, négligeant à ce point le fait que la prétendue désignation d'Abû Bakr pour diriger les prières aurait signifié qu'il avait été investi de l'Autorité Suprême.

Une grande partie des Musulmans infèrent donc d'une manière probante que l'imamat d'Abû Bakr fut imaginé après coup afin de justifier son accession au Pouvoir Suprême après la mort du Prophète.

Un autre jour, le Prophète s'adressa au peuple, après les prières, dans les termes suivants : "Frères ! Si j'ai causé injustement à quiconque d'entre vous un mal, je soumets mes épaules d sa vengeance. Si j'ai calomnié la réputation de quiconque d'entre vous, qu'il vienne relever mes fautes devant l'assemblée. Si je dois quoi que ce soit à quiconque, qu'il s'avance pour me réclamer son dû, le peu que je possède servira d m'acquitter. Je préfère subir un affront dans ce monde plutôt que dans l'autre". Et le Prophète d'ajouter : "Je n'ai rendu Iégal que ce que Dieu avait rendu légal, et je n'ai interdit que ce que Dieu avait prohibé".

Un homme sortit des rangs de l'assistance et réclama trois dirhams qui lui furent payés tout de suite. Après quoi, le Prophète rentra à la maison.

Dans la nuit du Samedi, la maladie du Prophète prit un tournant sérieux, et la fièvre, dit-on, ne diminua pas jusqu'au Dimanche soir. Dimanche, Osâmah sortit de son camp pour recevoir les bénédictions du Prophète avant son départ pour la Syrie, mais au moment de sa visite le Prophète était inconscient et évanoui. Osâmah lui parla, mais le Prophète ne lui répondit que par un mouvement de la main qu'Osâmah prit entre les siennes. Puis baisant la main et le front du Prophète, Osâmah retourna à son camp.

La Dernière Prière et le Dernier Sermon du Prophète dans son Masdjid
Tôt le lundi matin (le jour de Sa mort), le Prophète, toujours la tête bandée, sortit au Masdjid, soutenu par deux hommes. Après les prières, il fit un court sermon, d'une voix qu'on entendait au-delà des portes extérieures du Masdjid, lequel était inhabituellement rempli par les gens anxieux qui étaient venus s'enquérir de son état après la crise de la nuit précédente. Dans son sermon, le Prophète dit que les esprits malfaisants étaient proches et que la plus noire partie d'une nuit noire et tempétueuse s'approchait. A la fin du sermon, Abû Bakr dit : "ô Prophète ! Par la Grâce de Dieu, tu es mieux aujourd'hui !" Osâmah était lui aussi présent, pour recevoir les bénédictions du Prophète qui lui dit : "Dépêche-toi avec ton armée; que la bénédiction de Dieu soit avec toi". Osâmah retourna au camp et donna l'ordre du départ le même jour. Abti Bakr revint chez lui à al-Souh.

La Mort du Prophèt
e Le Prophète regagna sa maison et, exténué, se jeta sur son lit. Ses forces le lâchèrent rapidement.

IL appela toutes ses femmes près de lui et leur donna les instructions nécessaires en leur ordonnant de rester tranquilles dans leurs maisons et de ne pas se montrer dans un état de l'Epoque de l'Ignorance (Sourate al-Ahzâb, verset 33). Fatima, sa fille bien-aimée pleurait. Il l'appela, la fit asseoir à c6té de lui et chuchota quelques mots dans son oreille. Elle fondit en larmes.

Le Prophète glissa encore quelques mots dans son oreille et essuya ses larmes avec ses mains. Elle parut alors réconfortée et sourit.
Puis il appela al-Hassan et al-Hussayn, ses deux fils chéris qu'il n'avait cessé de caresser dans son giron depuis des années, voulant les embrasser pour la dernière fois. Al-HasAl Hassan Son visage sur celui du Prophète et al-Hussayn se jeta sur sa poitrine. Chacun d'eux se mit à sangloter et à crier avec une telle amertume que toute l'assistance vit leurs larmes perler dans leurs yeux.

Le Prophète les étreignit et les embrassa avec beaucoup d'affection et ordonna à toutes les personnes présentes de les traiter, ainsi que leur mère avec grand amour et respect, exactement comme il les traitait lui-même (le Prophète avait l'habitude de se lever et de faire un ou deux pas en direction de Fatima chaque fois qu'il la voyait venir vers lui. Il l'accueillait toujours avec une joie manifeste. Puis baisant sa main, il la faisait asseoir à sa propre place). Ensuite, il appela `Ali qui prit place près du lit.

Le Prophète lui ordonna de rendre la somme qu'il avait empruntée à un certain Juif pour couvrir les frais de l'expédition d'Osâmah, et lui enjoignit d'endurer avec patience et résignation les troubles auxquels il serait confronté après sa mort. IL lui demanda de rester patiemment sur son droit chemin menant à l'autre monde, lorsqu'il constaterait que les gens se trouveraient sur celui menant vers le monde d'ici-bas.

Le Prophète prit la tête de `Ali sous son manteau qui les couvrit tous deux, et ce jusqu'à ce que `Ali ait sorti sa tête pour annoncer la mort du Messager de Dieu.

Ibn Sa`d et al-Hâkim ont noté que le Prophète avait rendu le dernier soupir, sa tête dans le giron de `Ali (Madârij al-Nubuwwah).

Les derniers mots prononcés par le Prophète, selon `Ali furent : "La compagnie bénie dans 1e Ciel. Les prières", après quoi il s'est étiré doucement, et puis tout ont été finis.

Que la paix éternelle soit sur lui et sur les membres de sa famille qui se sont sacrifiés pour la cause de l'Islam et qui nous ont dirigés sur le droit chemin. Fatima, se frappant le visage et se lamentant d'amertume rejoignit les autres femmes qui gémissaient bruyamment. C'était à peine midi passé, le Lundi 2 Rabî` I de l'an onze (calculé en commençant par le mois de Moharrem), que le Prophète rendit l'âme, à l'âge de soixante-trois ans.

Les autres dates de la mort du Prophète, signalées par d'autres sources sont le 28 ?afar et le 12 Rabî`I. Le jour de son décès retenu unanimement est cependant un lundi.

Selon une tradition, avant la mort du Prophète, quelqu'un avait demandé la permission de lui rendre visite, alors qu'il se trouvait dans un état d'inconscience.

Fatima répondit au visiteur que le moment ne convenait pas à une telle intrusion. Sans prêter attention à la réponse, le visiteur avait demandé encore la permission de se rendre auprès du Prophète, et Fatima lui répondit de la même façon. Il réitéra sa demande une troisième fois sur un ton si horrible que Fatima en fut terrifiée. Jibrîl (l'ange Gabriel) qui était descendu en ce moment-là pour visiter le Prophète dit à ce dernier : "? Prophète ! C'est l'ange de la Mort.

IL te demande la permission d'entrer. Jamais auparavant, il n'a demandé la permission à aucun homme, et jamais par la suite il ne fera preuve d'une telle sollicitude envers aucun autre". Le Prophète demanda alors à Fatima de le laisser entrer.

L'ange de la Mort entra et s'arrêtant devant le Prophète, dit : "ô Prophète du Seigneur ! Dieu m'a envoyé à toi et m'a donné l'ordre d'agir selon ton désir.

Ordonne-moi d'arracher ton âme, je le ferai; ou bien ordonne-moi de la laisser, et je t'obéirai". Alors, Jibrîl s'interposa : "ô Ahmad ! Le Seigneur te désire (auprès de LUI)". "Vas-y donc, dit le Prophète à l'ange de la Mort, et fais ton travail". Jibrîl fit ses adieux au Prophète dans ces termes : "Que la paix soit sur toi ô Prophète du Seigneur ! Ma descente sur terre se termine avec toi". Le Prophète en décida ainsi et un gémissement de voix céleste s'éleva du convoi funèbre invisible.

La nouvelle de la mort du Prophète se répandit vite dans toute la ville de Médine et les gens affluèrent vers le Masdjid de toutes parts pour savoir la vérité. Abû Bakr se trouvait dans sa maison, à al-Sonh dans la banlieue de Médine. `aicha envoya Salim B. Abid pour le chercher tout de suite.

Oumar Joue une Scène Bizarre
Entre-temps une scène bizarre se jouait dans le Masdjid En effet, à peine après la mort du Prophète, `Omar entra dans l'appartement du Prophète et enlevant le drap qui couvrait son corps, regarda fixement les traits du Prophète, lequel semblait tombé dans un sommeil paisible. Remettant doucement la couverture sur le corps, il s'exclama : "le Prophète n'est pas mort Il est parti auprès de Son Seigneur, comme l'avait fait avant lui Mûsà, pour s'absenter pendant quarante jours.

Il retournera parmi nous encore". Brandissant son épée, il s'écria : "Je couperai la tête de quiconque oserait dire que le Prophète est mort". Alors que `Omar haranguait les gens de cette façon, Abû Bakr apparut.

IL écouta `Omar pendant un moment, puis emprunta la porte de l'appartement de `aicha, où il enleva à son tour le drap couvrant le corps du Prophète, se pencha sur lui et l'embrassa sur le front. Puis en posant la tête sur ses mains, il la leva légèrement et scruta les traits du visage minutieusement. Puis, reposant la tête doucement sur l'oreiller, il s'exclama: "Oui, doux tu étais dans la vie et doux tu es dans la mort. Hélas mon maître ! Tu es effectivement mort". Recouvrant le corps, il s'avança et se dirigea tout de suite vers l'endroit où `Omar brandissait son épée et haranguait les gens. "Calme-toi `Omar ! Assieds-toi !" s'écria-t-il. Mais `Omar ne l'écouta pas.

IL se tourna alors vers l'assistance et dit : "Avez-vous déjà oublié le verset coranique qui avait été révélé au Prophète après le jour d'Ohod ("Mohammad n'est qu'un Prophète; des prophètes sont morts avant lui. Retourneriez-vous sur vos pas, s'il mourait ou s'il était tué ?", (Sourate âle `Imrân, verset 144). Et ignorez-vous l'autre verset coranique révélé au Prophète : "Tu vas sûrement mourir, (ô Mohammad) et eux aussi vont mourir" (Sourate al-Zomar, 30). Et Abû Bakr de poursuivre : "Que celui qui adore Mohammad sache que Mohammad est vraiment mort, mais que celui qui adore Dieu sache que Dieu est immortel :

IL est vivant et ne meurt pas". La vérité étant à présent connue, l'assistance se mit à pleurer à chaudes larmes. On eût dit que les gens n'avaient jamais eu connaissance auparavant de ces versets coraniques, puisqu'on dut les leur répéter.

Omar lui-même, en les entendant fut frappé d'horreur. Plus tard il dira qu'ayant entendu Abû Bakr réciter lesdits versets, il se mit à trembler et s'écroula, et qu'il sut après avec certitude que le Prophète était vraiment mon. Om Aymân avait envoyé un messager à son fils Osâmah à Jorf pour l'informer de la condition critique du Prophète.

Osâmah avait déjà donné l'ordre à l'armée de se mettre immédiatement en marche et son pied était sur l'étrier lorsque le messager de sa mère arriva. Abasourdi par la nouvelle, Osâmah dispersa l'armée et retourna à Médine précédé par Boraydah B. al-Haçib, son porte-drapeau qui se dirigea directement vers le Masdjid où il planta l'étendard à la porte de la maison dans laquelle le Prophète était étendu mort.

Peu après ces péripéties, dans l'après-midi, un ami vint précipitamment vers Abû Bakr et `Omar au Masdjid pour les informer que plusieurs notables de Médine s'étaient réunis dans Saqîfah Banî Sâ`idah et qu'ils étaient en train d'élire comme dirigeant Sa`d B. `Obâdah. "Si vous voulez détenir l'Autorité Suprême, vous n'avez pas un moment à perdre, et vous devez arriver là-bas avant que l'affaire soit réglée et que l'opposition devienne dangereuse", leur dit-il. Ayant entendu cette nouvelle, Abû Bakr et `Omar accoururent à Saqîfah en compagnie d'Abû `Obaydah et de plusieurs autres personnes.

Le Lavage Rituel et l'Enterrement du Prophète.
Entre-temps, `Ali, ignorant ce qui se tramait à l'extérieur était occupé, à l'intérieur de la maison, à la préparation du lavage du corps du Prophète, en compagnie de `Abbâs et de ses deux fils, Fadhl et Qutham, ainsi que d'Osâmah et ?âleh ou Charqân. Ayant fermé la porte de l'appartement et arraché un rideau d'un drap de tissu du Yémen, ils y mirent le corps pour le laver.

Ali était la seule personne désignée par le Prophète pour laver son corps (comme il l'avait d'ailleurs prédit lorsqu'il avait donné le premier bain à `Ali au moment de sa naissance) puisqu'il avait dit que tout personne autre que `Ali qui regarderait sa nudité serait aveugle sur-le-champ. Ainsi `Ali lava le corps et les autres l'aidèrent.

Après le lavage du corps, ils l'amenèrent dehors et ils le revêtirent des vêtements dans lesquels il était mort. Deux draps de beau tissu blanc furent enroulés autour du vêtement et au-dessus de tout cela fut posé un drap de tissu rayé du Yémen. Puis vint le moment de la prière sur le corps.

Tout d'abord les proches parents, suivis par les Partisans et les Compagnons du Prophète, entrèrent dans la maison par groupes de dix personnes à la fois, et prièrent sur lui. Le corps resta ainsi jusqu'au moment de l'enterrement.

Les gens tombèrent en désaccord quant au lieu d'enterrement du Prophète. La question fut tranchée par `Ali qui affirma avoir entendu le Prophète dire que là où un Prophète meurt il doit être enterré. A Médine, il y avait deux fossoyeurs, Abû `Obaydah al-Jarrâh qui creusait les tombes des Mecquois et Abû Talhah Zayd B. Sâhel qui creusait les tombes des Médinois. `Abbâs envoya un homme pour les chercher tous les deux. Abû `Obaydah n'était pas chez lui, étant donné qu'il se trouvait avec Abh Bakr et `Omar à Saqîfah, occupé aux questions du Califat (la succession du Prophète); donc on ne pouvait pas faire appel à ses services. Abû Talhah vint et creusa le tombeau du Prophète.

L'enterrement eut lieu le mardi dans la nuit, ou le mercredi, t6t le matin. Le corps fut descendu dans le tombeau par les mêmes proches parents qui l'avaient lavé et transporté dehors. `Ali fut la dernière personne à quitter l'intérieur du tombeau. Le Lahad, ou la voûte, une fois refermé, le tombeau fut rempli de terre arrosée d'un peu d'eau.

Les gens quittèrent alors la tombe et se dirigèrent vers la maison de Fatima pour la consoler dans son deuil. `aicha continua à vivre dans la chambre contiguë à celle qui abritait le tombeau.

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